
La diversification de l’économie est un objectif irréversible que le gouvernement s’est assigné pour sortir le Congo de sa dépendance suicidaire au pétrole. Dans cette démarche, l’exécutif ne cesse de multiplier les initiatives et les partenaires. C’est tout l’intérêt de la mission qu’effectuent présentement les experts du cabinet Price Waterhouse Coopers (PWC) à Brazzaville. D’un département ministériel à un autre, ils organisent des séances de travail pour imprimer leur méthodologie et définir avec la partie congolaise, le cadre de son intervention au Congo. Le ministre en charge de l’économie, Gilbert Ondongo voudrait a dit tout l’intérêt de son pays, a profité de la riche expérience de ce cabinet qui, depuis 25 ans, travaille dans la conduite de grands projets de transformation en partenariat avec des administrations, des organisations internationales, des établissements publics des collectivités locales en France et en Afrique.
Depuis plusieurs décennies, le Congo a inscrit, année après année, la diversification de son économie dans son programme de développement. Mais, son économe demeure largement tributaire du pétrole. En témoignent les mauvais résultats des projets et programmes en cours d’exécution ou ceux en fin de cycle. Allusion faite au projet d’appui à la diversification de l’économie (PADE) exécuté depuis 2011 et du programme national de développement (PND) 2012-2016. Ces deux programmes, on le sait, n’ont pas donné satisfaction malgré d’énormes sommes d’argent injectées. Par exemple, le PADE a été cofinancé par le Congo et la Banque mondiale à hauteur de 10 milliards de FCFA. En six ans d’exercice, ses résultats donnent à réfléchir. Pourtant, l’objectif de ce projet est bien clair : promouvoir les investissements dans les chaines de valeur hors pétrole et soutenir un tissu de Pme.
Le cabinet PWC en activités dans plusieurs pays et au chevet de nombreuses institutions internationales dans le monde entend imprimer sa méthodologie de diversification de l’économie congolaise aujourd’hui, au creux de la vague. Son approche est contraire aux autres : éviter le saupoudrage pratiqué par la plupart des projets initiés aux mêmes fins, en préférant se concentrer sur quelques secteurs bien précis pour éviter de trop embrasser. Pêle-mêle, il a été noté l’identification des facteurs de compétitivité et l’accélération des réformes sur les secteurs dits clé. Le but visé étant d’opérer la diversification économique en ciblant les impacts des différents projets, en termes de création d’emplois et d’amélioration du PIB.
Au cours de la séance de travail qu’ils ont eue avec les cadres du ministère de l’économie, du développement industriel et de la promotion du secteur privé, les experts du PWC ont insisté sur la promotion du dialogue public-privé. Entendu que c’est au secteur privé qu’incombe la mission de diversifier l’économie ; l’Etat lui, ne jouant que le rôle de régulation. Présentant la stratégie de PWC, Davidson Moutou, Senior manager du cabinet a été explicite sur la vision du cabinet qu’il dirige :
PWC évolue dans 34 pays dont le Sénégal, l’Algérie, le Ghana, le Maroc, la Tunisie..., où il est impliqué dans les missions de concevoir et mettre en place des projets d’amélioration de la performance, tout en contrôlant l’efficacité de la gestion et en respectant les exigences élevées en matière d’utilisation des ressources publiques, en harmonie avec les spécificités de chaque Etat.
Une mission difficile au Congo ?
La tâche qui attend le cabinet PWC n’est pas aisée, surtout en raison des habitudes installées ici. Pourtant, il lui faut réussir là où d’autres ont failli, notamment en proposant au gouvernement une offre plus réaliste sur les conditions de l’émergence du secteur privé, pour attirer des investissements dans les chaînes de valeur hors pétrole, porteuses de croissance. Cela suppose un climat d’affaires réellement assaini, et non de simples mots comme pour se faire bonne conscience. Les réformes engagées à ce jour, sont elles suffisantes pour permettre au cabinet PWC de bien exercer ? Sinon, en puisant dans son expérience, particulièrement son partenariat avec les différents pays où le cabinet a exercé, afin de saisir le fil d’Ariane capable de conduire le Congo dans la bonne direction. Ce qui est sûr c’est qu’aujourd’hui, le pays est dans les profondeurs du classement Doing Business, soit 176è place en 2016. Pour réussir sa mission, le cabinet PWC est appelé à faire une bonne lecture du PND 2012-2016 et du PADE, et savoir tirer toutes les leçons qui s’imposent. Exécutés à grands frais avec des objectifs nobles pour le pays, ces deux projets n’ont presque pas donné satisfaction, même si dans les rapports des différentes revues, les résultats présentés sont positifs. Dans ce pays gangréné par la mauvaise gestion, la fraude, la corruption et la concussion, il serait impérieux d’engager des réformes des finances publiques permettant d’inaugurer la culture de la transparence et de l’obligation de rendre compte, d’axer la gestion sur les résultats. De même, ainsi qu’il est défini dans les annales de PWC, des structures de planification de suivi-évaluation dédiées devraient mises en place.
Jules Débel